Rio de Janeiro ! Dimanche 15 Mars 2015.-
Par François cardona (RFI)
Près d’1,5 million de Brésiliens ont manifesté, dimanche 15 mars 2015, dans les principales villes du pays pour réclamer le départ de la présidente Dilma Rousseff. Ils ont même défilé dans plusieurs capitales étrangères, comme à Londres, Buenos Aires et Sydney. Dilma Rousseff est depuis des semaines la cible d’une grogne montante en raison du scandale de corruption Petrobras.
C’est Sao Paulo qui a battu le record de mécontents dimanche. Ils étaient plus d’un million à défiler sur Paulista, l’avenue principale de la capitale économique brésilienne. Mais d’autres grandes marches de protestation se sont tenues dans plus de 80 villes du pays. Les manifestants, habillés en jaune et vert, les couleurs nationales, ont unanimement exigé la destitution de Dilma Rousseff. Une foule immense de mécontents, dont certains exigeaient même une intervention militaire pour en finir avec la corruption.
A moins de 23 % de popularité dans les sondages, la présidente est éclaboussée par le scandale Petrobras, la plus grave affaire de corruption de l’histoire du Brésil : trois milliards d’euros détournés des comptes du géant pétrolier brésilien Petrobras.
Des dizaines de députés et sénateurs, appartenant majoritairement à la coalition au pouvoir, sont soupçonnés par la justice d’avoir perçu des pots-de-vin. La présidente était membre du conseil d’administration de Petrobras au moment des faits. Comment n’aurait-elle pas su ? C’est ce qu’ont clamé toute la journée les manifestants dans le pays.
En début de soirée dimanche, après les manifestations, le ministre de la Justice a tenu une conférence de presse. Il a déclaré que la présidente annoncerait dans les prochains jours des mesures contre lacorruption et l’impunité, ainsi qu’une ample réforme politique.
Mais alors que le ministre s’exprimait à la télévision, dans de très nombreuses villes, un panelaço a retenti. Le panelaço, c’est quand les Brésiliens de la classe moyenne tapent sur des casseroles à leur fenêtre pour exprimer leur mécontentement.
Le scandale s’amplifie alors que le Brésil est au bord de la récession, avec une forte augmentation des prix. La classe moyenne en est la première victime. La présidente affronte donc à la fois des accusations de corruption et la crise économique. Une équation difficile à résoudre sous la pression de la rue.
Pour Stéphane Monclaire, maître de conférences à l’Université Paris I et spécialiste du Brésil, ces manifestations sont avant tout la preuve de la bonne santé de la démocratie brésilienne. « C’est le trentième anniversaire du retour du Brésil à la démocratie. Et c’est une bonne chose qu’il y ait des manifestations de rue. Cela montre que la population est capable d’exprimer son mécontentement sur tout un ensemble de sujets », analyse-t-il.
En revanche, ce n’est évidemment pas une bonne chose pour le gouvernement de Dilma Rousseff.« Les gens qui manifestent sont aujourd’hui plus nombreux que ceux qui ont manifesté il y a deux jours. Ce jour-là, c’étaient des manifestations de soutien à Dilma Rousseff et à l’entreprise Petrobras qui est au cœur d’un vaste scandale de corruption. Voir que des élus se sont servis de cette entreprise comme d’une vache à lait, ça écœure beaucoup de Brésiliens.
Et ce scandale s’ajoute aux autres, alors même que la situation économique actuelle n’est pas bonne – l’inflation tourne autour de 7,5 %, il n’y a plus de croissance économique, le chômage redémarre. Ce n’est pas la goutte d’eau qui fait déborder le vase, mais ça énerve, ça irrite une partie de la population ».