Port-au-Prince ! Jeudi 24 Juillet 2014.-
Monsieur le Secrétaire Exécutif,
Votre lettre ouverte publiée dans le Nouvelliste #39277 du Jeudi 24 Juillet 2014 a bien retenu mon attention et je m’empresse de vous apporter des éléments de réponse sur la situation actuelle de l’Hôpital Notre Dame de Petit-Goâve en utilisant le même canal de communication.
En tant que Ministre de la Santé Publique et de la Population, je me permets de vous rappeler la Mission du Ministère que nous avons la responsabilité de diriger. Cette mission, stipulée dans la Politique Nationale de Santé élaborée en 2012, est de «Garantir à tous les citoyens sans distinction le droit à la vie, à la santé et leur assurer, dans toutes les collectivités territoriales, les moyens appropriés pour la protection, le maintien et le rétablissement de leur santé ».
Ainsi donc, en tant que professionnelle de la santé ayant fait le choix de la sauvegarde des vies, il existe tout à fait une concordance entre la nôtre et la vôtre responsable de la sauvegarde des Droits Humains. La Santé est plus qu’un droit vu de l’angle du professionnel en santé, c’est un devoir de service.Sans faire d’autre considération, je vais rentrer directement dans le vif du sujet.
La grève à l’Hôpital Notre Dame de Petit-Goâve est le résultat tangible de la politisation de la Santé dans notre pays et c’est cette politisation qui nous a conduits à l’agent causal que constitue la catégorie des employés à gage. Cette catégorie n’existe nulle part dans les documents de référence de la fonction publique et encore moins du Ministère de la Santé.
En 2012, le Ministère a introduit son Référentiel des Emplois et des Compétences qui peut être consulté sur son site www.mspp.gouv.ht pour progressivement se défaire de la catégorie appelée « lagel yon ti koté pou mwen » qui alimente en grande partie et sous pression la catégorie des employés à gage légalement inexistante.
A titre de rappel, nous avons deux types d’employés : les fonctionnaires publics et les contractuels approuvés par la Cour Supérieure des Comptes. L’employé à gage relève d’un accord interne entre l’administration de l’hôpital et ce dernier. Certaines fois sans aucune notification et encore moins de document administratif.
Vous conviendrez avec moi que l’expression « à gage » traduit une réalité volatile et même ponctuelle. Donc comment vérifier véritablement que ces « employés à gage »ont 18 à 20 mois d’arriérés de rémunération surtout dans une institution identifiée comme corrompue par des élus locaux lors du « Gouvenmen Lakay » tenu à Petit-Goâve.
Cette assertion a même valu une décision publique prise ce jour-là de faire intervenir l’Unité de Lutte Contre la Corruption et la Justice de notre pays. Il ne serait aussi pas superflu de mentionner que 31 professionnels de santé ont été nommés à cette institution depuis notre arrivée au Ministère de la Santé. Toute la turbulence a débuté à partir de la première action de l’ULCC qui d’ailleurs continue son investigation.
En effet, l’Hôpital est rentré en grève le 12 juin 2014 et le Ministère a immédiatement réagi par l’intermédiaire de la Direction Sanitaire de l’Ouest pour s’enquérir du problème. Une autre rencontre s’est encore tenue environ une semaine plus tard avec la Direction départementale. Entretemps, l’Administrateur départemental a été muté et un appel à candidature publié dans le Nouvelliste pour pouvoir le remplacer, mais ce ne fut pas chose facile pour toutes sortes de raison. Finalement le Ministère de la Santé Publique a consenti un contrat pour un Administrateur et un Chef du Personnel, lesquels sont en approbation à la Cour Supérieure des Comptes.
Parallèlement, en raison de menaces proférées contre le Directeur Médical, le Dr Watson Exantus mentionné dans votre lettre, ce dernier a sollicité un transfert et en attendant s’est rendu au Canada pour ne revenir que le lundi 21 Juillet une fois les formalités administratives conclues.
Le 22 Juillet 2014, à la requête du Président de la Chambre des Députés Mr Stevenson J. Thimoléon aussi Député de Petit-Goâve, la Haute instance du Ministère a rencontré une délégation de ce groupe de personnes à gage pour tenter de trouver une issue au problème et des étapes très claires ont été arrêtées. Il faut aussi souligner que cette rencontre nous a permis de découvrir des badges n’ayant rien à voir avec le MSPP, et pire encore, munis de fausses signatures scannées dont la mienne. Encore là, l’ULCC fut immédiatement saisie de l’affaire.
Comme vous l’avez mentionné dans votre lettre Mr le Secrétaire Exécutif, une commission sera placée dès le 25 Juillet 2014 à la tête de l’Hôpital Notre Dame de Petit-Goâve pour essayer de rétablir le fonctionnement normal ainsi qu’une certaine sérénité indispensable à l’accomplissement de sa mission.
J’ai tenu à étaler les faits tels qu’ils se sont produits de façon à vous prouver qu’il n’y a pas eu de laxisme du côté du Ministère de la Santé et encore moins de manque de transparence dans la gestion de cette crise qui est beaucoup plus complexe qu’elle ne parait.
Elle risque de devenir encore plus profonde si certaines personnalités pensent pouvoir continuer ou commencer à la politiser. L’Hôpital a toujours été et restera au service de toute la population de Petit-Goâve et de ses environs sans exclusive de race, de conditions socio-économiques ou d’appartenance politique.
Je souhaiterais vivement que la POHDH nous aide à mener cette noble mission que nous nous sommes donnés, celle de Sauver des Vies en dépolitisant la Santé en Haïti.
Avec mes professionnelles salutations.
Dr Florence Duperval Guillaume
Ministre de la Santé Publique et de la Population
HIP