Port-au-Prince ! Samedi 16 Mai 2015.-
L’Institut national d’administration de gestion et des hautes études internationales (INAGHEI) a accueilli le jeudi 14 mai 2015, la première conférence-débat, réalisée autour du thème « Les prochaines élections de 2015 : enjeux et perspectives », choisi par le comité des étudiants, présidé par Emmanuel Jeff Morose, en accord avec le décanat dans le cadre de l’activité dénommée « Collecte de livres ».
Les intervenants étaient l’économiste Camille Charlmers, l’historien Georges Michel et le journaliste Frantz Duval.
C’est le Doyen de l’INAGHEI, Robert Joseph qui a ouvert l’activité du jour en souhaitant la bienvenue aux participants composés en majorité d’étudiants et en remerciant les invités pour leur support à la démarche.
L’étudiant en sciences politiques à la faculté, Bobyd’son Pierre, qui après quelques mots pour situer le contexte de cette conférence-débat, a introduit au micro le professeur James Boyard jouant lui, le rôle de modérateur.
Dans ses propos d’introduction, le professeur Boyard qui enseigne les relations internationales à l’INAGHEI, a indiqué que dans un système politique libéral, les élections libres et démocratiques, ont une quadruple fonction.
1) Elles sont à la base des principes de l’alternance politique et de multipartisme.
2) Elles permettent de légitimer l’action et l’autorité des dirigeants politiques.
3) Elles restent dans le monde contemporain le seul mécanisme qui permet l’exercice du pouvoir politique suivant un modèle institutionnel.
4) Elles constituent les seuls processus qui permettent aux citoyens d’exercer leur droit de vote à la fois pour choisir et sanctionner leurs dirigeants.
Entrant dans le vif du sujet, le premier intervenant Monsieur Frantz Duval, Rédacteur en chef du plus ancien journal d’Haïti « Le Nouvelliste », a déclaré que les élections sont la façon la moins mauvaise de changer de gouvernement et sont aussi les moins couteuses que les autres façons de prendre le pouvoir.
Paul Eugène Magloire fut le premier président élu en Haïti au suffrage universel sans le vote des femmes. François Duvalier est le premier président élu en Haïti au suffrage universel avec le vote des hommes et des femmes, a expliqué Monsieur Duval.
Il a rappelé que de 1987 à 1990, Haïti qui a une très longue histoire de militaires au pouvoir, a connu des péripéties citant à titre d’exemple, le massacre de la ruelle Vaillant perpétré, le 29 novembre 1987, le jour des premières élections, qui ont suivi la chute de Jean-Claude Duvalier
Depuis plusieurs années, les résultats des élections sont communiqués par la population qui a toujours gagné la rue pour revendiquer son vote, a dit Monsieur Frantz Duval soutenant par ailleurs qu’en 2010, c’est la première fois que l’on a eu l’alternance politique en Haïti.
Il a par ailleurs, fait remarquer que les enjeux aujourd’hui sont pareils à ceux de 2010 tout en notant qu’en 2015 pour la première fois, il existe l’inclusion de tous les groupes politiques.
Le deuxième intervenant, professeur Camille Charlmers, coordonateur de la Plate forme de plaidoyer pour un développement alternatif (PAPDA), a évoqué plusieurs facteurs qui concernent particulièrement les relations de pouvoir, les constantes, les changements importants vers la bonne direction en vue d’expliquer le fonctionnement du système politique appliqué en Haïti.
L’Etat est l’acteur central du système mondial, a dit le professeur Charlmers qui souligne la présence aujourd’hui d’autres acteurs comme le Fonds monétaire international, la Banque mondiale, les multinationales, qui ont changé la donne.
En Amérique latine, au cours des vingt (20) dernières années, il y a eu l’émergence de mouvements sociaux qui ont modifié des changements de rapports qualitatifs, a expliqué l’économiste. Il a par ailleurs, soutenu que la gouvernance est liée à un ensemble de choix politiques, selon les critères définis par la banque mondiale qui a-t-il, affirmé, ne sont autres que des critères politiques.
Le système politique appliqué en Haïti favorise l’exclusion des masses, selon le professeur Camille Charlmers faisant en outre, remarquer que ledit système réalise des élections qui reproduisent ce qu’il appelle l’apartheid.
Gagner dans les rues, perdre dans les procès-verbaux, ce sont les propos tenus par le coordonateur de la PAPDA pour illustrer la façon dont les élections sont organisées en Haïti.
Selon Camille Charlmers, il faut entre autres, décoloniser l’espace électoral en soulignant que la mécanique électorale est contrôlée par le programme des nations unies pour le développement (PNUD), qui gère des fonds destinés à la réalisation des prochaines élections en Haïti ; débanaliser l’espace électoral où des dizaines de candidats décident de se lancer dans la course présidentielle dont la majorité ne tiennent pas compte de leur niveau et/ou de leur capacité à mener à bon port la barque du pays.
Le troisième intervenant Georges Michel, également journaliste, qui était arrivé en retard, n’a pas eu le temps d’intervenir sur le thème du jour.
En faisant une ouverture sur la récente visite à Port-au-Prince du président François Hollande, Monsieur Michel a préféré le terme « dette française » à celui de « dette de l’indépendance ».
L’historien a par ailleurs, fait remarquer que la dette morale de la France envers Haïti, évoquée par le président français, est préférable à la dette chiffrée.
Abordant parallèlement, la question de la nationalité, un des deux motifs du rejet de la candidature de Madame Sophia Martelly au sénat pour l’ouest, par le conseil électoral provisoire, Monsieur Georges Michel s’est prononcé contre cette décision qui dit-il, n’est pas en conformité avec la constitution de 1987.
Les panélistes à l’exception du professeur Camille Charlmers, qui ne pouvait pas rester jusqu’à la fin de l’activité, ont répondu aux différentes questions des étudiants.
Le journaliste Frantz Duval, a déclaré pour sa part, qu’Il n’y a pas un horizon fini pour la démocrate, pour le développement en réponse à un étudiant qui s’interrogeait sur le modèle de démocratie pratiqué en Haïti ; alors que le professeur Boyard dans ses approches sur le système politique, les élections, a fait état de la prolétarisation de la politique en Haïti en faisant allusion surtout au nombre élevé de candidats qui veulent participer aux prochaines élections.
Le débat s’est terminé sur une note de satisfaction et sous les applaudissements des étudiants de l’INAGHEI, qui ont salué cette initiative et la qualité des interventions.
André Marc Odigé
andremarcodige@yahoo.fr
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HIP